Partager


 
Qohèlèt ­ Qohèlèt ­ L’Ecclésiaste


Liminaire pour Qohèlèt

     Qohèlèt dérive de la racine qhl, qui signifie « assembler ». Il a été traduit en grec, puis en latin, par Ecclesiastes, mot qui dérive lui-même de ecclesia, « assemblée ». Qohèlèt est à la fois un « rassembleur » de sentences, et celui qui se lève au sein de l’assemblée pour en être le « prédicateur ».

     Le ton général de l’ouvrage, sa signification la plus profonde, est donné par le deuxième verset, qui sert de leitmotiv au livre tout entier: Habèl ha balîm hakol habèl, « Fumée de fumées, tout est fumée ». La traduction du mot habèl par « vanité » n’a pas peu contribué à brouiller les pistes qui peuvent conduire à une exacte compréhension de la pensée de Qohèlèt. Est vain ce qui est dépourru de valeur. Parler de vanité implique un jugement de valeur.

     Or le mot habèl est essentiellement concret. Il signifie « fumée », « vapeur », « haleine ». Qohèlèt ne porte pas un jugement de valeur sur le réel; il dresse un constat: tout est fumée. Le bonheur, le travail, la sagesse, la vie, l’humanité, la famille, l’argent, la fortune, la gloire, le désir, le rire, l’avenir, la jeunesse, les jours de l’homme; oui, tout est fumée. Qohèlèt se situe dans l’ordre des constatations objectives. Sa pensée est davantage métaphysique que moralisante. Il tente de décrire la condition humaine sous l’angle de ce qui passe: état de fait indéniable et qui porte à conséquence pour la pensée et la conduite de l’homme.

     Il faut reconnaître qu’il est difficile de déceler la structure logique de son oeuvre, aussi variée et semée de contradictions que la vie dont elle entend cerner le mystère. L’unité du livre réside surtout dans son style, véritablement étincelant.

     On a souligné la parenté de certaines expressions de Qohèlèt avec des textes ougaritiques ou phéniciens. Au IIIe siècle avant notre ère, date probable de sa rédaction, la Phénicie et la terre d’Israël étaient sous la domination des Ptolémées et sous l’influence de la culture grecque. Quoi qu’il en soit, il est impossible de mettre une étiquette sur une pensée aussi riche et aussi évidemment personnelle. Qohèlèt reste, aujourd’hui encore, un penseur original, et c’est son oeuvre elle-même qui importe. Les jeux intellectuels de ses commentateurs sont souvent, eux aussi, fumée !


Chapitre 1.

Fumée de fumées

1.     Paroles de Qohèlèt, le fils de David, roi de Ieroushalaîm.
2.     Fumée de fumées, dit Qohèlèt; fumée de fumées, tout est fumée.
3.     Quel avantage pour l’humain en tout son labeur,
dont il a labeur sous le soleil ?
4.     Un cycle va, un cycle vient; en pérennité la terre se dresse.
5.     Le soleil brille, le soleil décline; à son lieu il aspire et brille là.
6.     Il va au midi, il tourne au septentrion, il tourne,
tourne et va, le souffle, et retourne sur ses tours, le souffle.
7.     Tous les torrents vont à la mer et la mer n’est pas pleine.
Au lieu où les torrents vont, là, ils retournent pour aller.
8.     Toutes les paroles lassent, l’homme ne peut pas en parler.
L’oeil ne se rassasie pas de voir, l’oreille ne se remplit pas d’entendre.
9.     Ce qui a été sera, ce qui s’est fait se fera:
il n’est rien de tout neuf sous le soleil.
10.     Il est une parole qui dit: « Vois cela, c’est neuf ! »
C’était déjà dans les pérennités, c’était avant nous.
11.     Pas de souvenirs des premiers, ni même des derniers qui seront,
pas de souvenir d’eux, ni de ceux qui seront en dernier.

Moi, Qohèlèt

12.     Moi, Qohèlèt, j’ai été roi d’Israël à Ieroushalaîm.
13.     J’ai donné mon coeur à consulter et prospecter la sagesse,
sur tout ce qui s’est fait sous les ciels.
C’est un intérêt malin qu’Elohîms donne aux fils de l’humain
pour s’en violenter.
14.     J’ai vu tous les faits qui se sont faits sous le soleil:
et voici, le tout est fumée, pâture de souffle.
15.     Ce qui est tordu ne peut se réparer;
ce qui manque ne peut être compté.
16.     Moi, j’ai parlé avec mon coeur pour dire:
Me voici, j’ai fait grand, j’ajoute la sagesse
à tout ce qui était avant moi sur Ieroushalaîm.
Mon coeur voit la sagesse, la pénétration multiple.
17.     J’ai donné mon coeur à pénétrer la sagesse, la pénétration,
l’insanité, la folie. Je sais que cela aussi est paissance de souffle.
18.     Oui, à trop de sagesse, trop d’irritation;
qui ajoute à la pénétration ajoute à la douleur.

Chapitre 2.

Le bonheur, fumée

1.     Moi, j’ai dit en mon coeur:
Va donc ! Je t’éprouverai par la joie, vois le bien !
Et voici, lui aussi est fumée.
2.     Au jeu j’ai dit: « Insane »;
à la joie: « Celle-là, que fait-elle ? »
3.     J’ai prospecté mon coeur pour attirer ma chair au vin.
Mon coeur s’est conduit avec sagesse pour saisir la folie,
jusqu’à ce que je voie ce qu’il est bien pour les fils de l’humain
de faire sous les ciels, le nombre des jours de leur vie.
4.     J’ai agrandi mes oeuvres, je me suis bâti des maisons,
je me suis planté des vignobles.
5.     Je me suis fait des jardins, des vergers,
j’y ai planté des arbres de tous fruits.
6.     Je me suis fait des piscines d’eaux,
pour en arroser la forêt germante d’arbres.
7.     J’ai acheté des serviteurs, des domestiques;
j’ai eu des fils de maison et même du cheptel, bovins et ovins;
j’en ai eu une multitude,
plus que ceux qui étaient avant moi à Ieroushalaîm.

Mon labeur

8.     J’ai aussi amassé pour moi de l’argent et de l’or,
le domaine de rois et de cités.
Je me suis fait des poètes et des poétesses,
les jouissances des fils de l’humain: une démone, des démones.
9.     J’ai agrandi et ajouté plus que tout ce qui était avant moi à Ieroushalaîm.
Mais ma sagesse se dressait pour moi.
10.     Je n’ai pas préservé mes yeux de tout ce qu’ils demandaient;
je n’ai interdit aucune joie à mon coeur.
Oui, mon coeur s’est réjoui de tout mon labeur.
Ceci était ma part de tout mon labeur.
11.     Moi, j’ai fait face en toutes mes oeuvres que mes mains ont faites,
et au labeur que j’ai eu pour labeur de faire.
Et voici, le tout est fumée, paissance de souffle.
Pas davantage sous le soleil !

Le sage et le fou

12.     Moi, j’ai fait face pour voir la sagesse, l’insanité, sa folie.
Oui, quel humain viendra contre le roi, avec ce qu’ils ont déjà fait ?
13.     Et moi j’ai vu qu’il est un avantage à la sagesse sur sa folie,
comme l’avantage de la lumière sur les ténèbres.
14.     Le sage a ses yeux dans sa tête, le fou va dans la ténèbre.
Moi aussi, je sais qu’une même aventure advient à tous.
15.     Moi, j’ai dit en mon coeur: L’aventure du fou m’adviendra à moi aussi.
Alors, moi, pourquoi m’assagir davantage ?
Et j’ai parlé en mon coeur: Cela aussi, fumée !
16.     Car il n’est pas de souvenir pour le sage avec le fou, en pérennité,
parce que déjà aux jours qui viennent tout est oublié.
Eh quoi ! Le sage meurt avec le fou !
17.     Je hais la vie: oui, un mal pour moi,
le fait qui s’est fait sous le soleil.
Oui, le tout est fumée, paissance de souffle.
18.     Mais moi, je hais tout mon labeur que j’ai eu pour labeur,
moi, sous le soleil, et que je laisserai à l’humain qui sera après moi.
19.     Mais qui sait s’il sera sage ou fou ?
Il dominera tout mon labeur que j’ai eu pour labeur,
et par lequel j’étais sage sous le soleil. Cela aussi, fumée !
20.     Je me suis tourné, moi, afin de désespérer mon coeur
de tout le labeur que j’ai eu pour labeur sous le soleil.

Manger et boire

21.     Oui, il existe un humain au labeur de sagesse,
de pénétration et de talent.
Mais il donne sa part à un humain qui n’avait pas eu de labeur avec lui.
Cela aussi, fumée, malheur multiple !
22.     Oui, qu’en est-il de l’humain pour tout son labeur,
et pour la paissance de son coeur, en son labeur sous le soleil ?
23.     Oui, tous ses jours sont douleurs, et son intérêt irritation.
Même la nuit, son coeur ne se couche pas. Cela aussi, c’est fumée !
24.     Nul bien pour l’humain autre que de manger, de boire,
de faire voir à son être le bien dans son labeur.
Cela aussi, je le vois, moi, oui, c’est de la main d’Elohîms.
25.     Oui, qui mange et qui ressent hors de moi ?
26.     Oui, à l’homme qui est bien en face de lui
il donne sagesse, pénétration et joie.
Au fauteur il donne de l’intérêt pour rajouter et amasser,
afin de le donner à l’homme de bien, en face d’Elohîms.
Cela aussi, fumée, pâture de souffle !

Chapitre 3.

Un temps pour tout

1.     Un moment pour tout, un temps pour tout désir sous les ciels.
2.     Un temps pour enfanter, un temps pour mourir.
Un temps pour planter, un temps pour extirper le plant.
3.     Un temps pour tuer, un temps pour guérir.
Un temps pour faire brèche, un temps pour bâtir.
4.     Un temps pour pleurer, un temps pour rire.
Un temps se lamenter, un temps danser.
5.     Un temps pour jeter des pierres, un temps pour ramasser des pierres.
Un temps pour étreindre, un temps pour s’éloigner d’étreindre.
6.     Un temps pour chercher, un temps pour perdre.
Un temps pour garder, un temps pour jeter.
7.     Un temps pour déchirer, un temps pour coudre.
Un temps pour chuchoter, un temps pour parler.
8.     Un temps pour aimer, un temps pour haïr.
Un temps, la guerre, un temps, la paix.

Rien à ajouter

9.     Quel est l’avantage de l’ouvrier en ce qu’il a pour labeur ?
10.     J’ai vu l’intérêt qu’Elohîms a donné aux fils de l’humain,
pour les violenter.
11.     Le tout, il l’a fait bel en son temps.
La pérennité aussi, il l’a donnée en leur coeur,
sans que l’humain ne trouve le fait qu’Elohîms a fait,
depuis la tête et jusqu’à la fin.
12.     Je le sais, ils n’ont de bien en eux que de se réjouir
et de bien faire en sa vie.
13.     Aussi tout humain qui mange, boit et voit le bien en tout son labeur:
voilà un don d’Elohîms !
14.     Je le sais, tout ce que l’Elohîms fait est en pérennité.
Il n’y a rien à y ajouter et rien à en retrancher.
L’Elohîms fait qu’ils frémissent en face de lui.
15.     Ce qui était est déjà; ce qui doit être était déjà.
Elohîms cherche le persécuté.

L’humain et la bête

16.     Je vois encore sous le soleil:
au lieu de jugement, le crime; au lieu de justice, le criminel.
17.     Moi, je dis en mon coeur: l’Elohîms juge le juste et le criminel.
Oui, il est un temps à tout désir et à tout fait, là.
18.     Moi, je dis en mon coeur sur la parole des fils de l’humain:
l’Elohîms les sélectionne pour voir qu’ils sont des bêtes,
eux-mêmes pour eux-mêmes !
19.     Oui, l’aventure des fils de l’humain et l’aventure de la bête
est la même aventure,
la mort de celui-ci est comme la mort de celui-là.
Un seul souffle pour tous;
la supériorité de l’humain sur la bête est nulle. Oui, le tout, fumée !...
20.     Tout va vers un lieu unique;
tout est poussière et tout retourne à la poussière.
21.     Qui sait si le souffle des fils de l’humain monte en haut,
et le souffle de la bête descend en bas, sous terre ?
22.     Je vois qu’il n’est rien de meilleur pour l’humain
que de se réjouir en ses faits.
Oui, c’est sa part, car qui le fera venir pour voir ce qui sera après lui ?

Chapitre 4.

Je félicite les morts

1.     Mais je me retourne, moi, et je vois toutes les oppressions
qui se font sous le soleil.
Voici les larmes des opprimés, sans réconfort pour eux;
la force est en main de leurs oppresseurs, sans réconfort pour eux.
2.     Et je félicite, moi, les morts qui sont déjà morts,
plutôt que les vivants qui sont encore en vie.
3.     Et, mieux que les deux, celui qui n’est pas encore,
qui n’a pas vu le fait du mal qui se fait sous le soleil.
4.     Et je vois, moi, tout le labeur et tout le talent du fait:
oui, c’est l’ardeur de l’homme contre son compagnon.
Même cela, fumée, pâture de souffle.
5.     Le fou croise ses mains et mange sa propre chair.
6.     Une paume pleine de repos, plutôt que deux poignées
pleines de labeur et de pâture de souffle.

7.     Mais je me retourne, moi, et vois une fumée sous le soleil:
8.     quelqu’un existe, sans second, sans fils, ni frères aussi,
et sans fin à tout son labeur.
Son oeil aussi ne se rassasie pas de richesse:
« Pour qui dois-je peiner et priver mon être de bonheur ? »
Cela aussi, fumée, intérêt du mal, lui !

Un, deux, trois

9.     Deux valent mieux qu’un, parce qu’un bon salaire existe à leur labeur.
10.     Oui, s’ils tombent, l’un relève son compère;
mais, si un seul tombe, pas de second pour le relever !
11.     Si deux se couchent aussi, ils ont chaud;
mais un seul, comment se chauffe-t-il ?
12.     Si l’un est attaqué, les deux se dressent contre.
Triple fil ne se désagrège pas vite.
13.     Mieux vaut un enfant mesquin mais sage qu’un vieux roi, mais fou,
qui ne sait plus être prudent.
14.     Oui, il sort de la maison d’arrêt pour régner,
mais, même pour son règne, il naît indigent.
15.     Je vois tous les vivants aller sous le soleil,
avec le deuxième enfant qui se dresse à sa place.
16.     Pas de fin à tout le peuple, à tous ceux qui sont en face d’eux;
les derniers aussi ne se réjouissent pas de lui.
Oui, cela aussi, fumée, paissance de souffle.
17.     Garde ton pied quand tu vas à la maison d’Elohîms;
approche pour entendre, plutôt que d’offrir un sacrifice avec les fous:
oui, ils ne savent rien d’autre que méfaire.

Chapitre 5.

Nul ne désir les fous

1.     Ne t’affole pas de ta bouche, que ton coeur ne se hâte pas
d’exprimer une parole en face de l’Elohîms:
oui, l’Elohîms est dans les ciels, et toi sur terre;
sur quoi, que tes paroles soient brèves.
2.     Oui, le rêve vient de trop d’intérêt, et la voix du fou de trop de paroles.
3.     Quand tu voues un voeu à Elohîms, ne tarde pas à le payer,
car nul ne désire les fous. Paie ce que tu as voué.
4.     Mieux vaut ne pas vouer que vouer et ne pas payer.
5.     Ne donne pas à ta bouche de faire fauter ta chair,
et ne dis pas en face du messager: « Oui, c’était par inadvertance. »
Pourquoi Elohîms écumerait-il contre ta voix ?
Sabote-t-il l’ouvrage de ta main ?
6.     Oui, en trop de rêves, de fumées et de multiples paroles,
oui, frémis de l’Elohîms !
7.     Si tu vois dans la cité l’indigent opprimé,
la maraude du jugement et de la justice, ne t’étonne pas de la tendance:
oui, un supérieur garde le supérieur, avec des supérieurs sur eux.
8.     L’avantage de la terre, en tout, c’est un roi au champ servi.

La richesse et la mort

9.     L’amoureux de l’argent ne se rassasie pas d’argent,
ni l’amoureux de l’opulence, du revenu.
Cela aussi, fumée !
10.     À la multiplication du bien, ses mangeurs se multiplient.
Quel talent à ses maîtres, sinon voir de ses yeux ?
11.     Le sommeil du serviteur est doux; peu ou prou, il mange;
la satiété du riche ne le laisse pas sommeiller.
12.     Il existe un malheur maladif, je l’ai vu sous le soleil,
une richesse gardée par son maître pour son malheur.
13.     Il perd cette richesse dans une mauvaise affaire;
le fils qu’il a fait enfanter sera sans rien en sa main.
14.     Comme il est sorti du ventre de sa mère,
nu il s’en retourne, pour s’en aller comme il était venu.
Il n’emportera rien de son labeur, qui s’en est allé de sa main.
15.     Cela aussi est un malheur maladif:
tout comme il était venu, ainsi s’en va-t-il.
Quel avantage pour lui d’avoir eu du labeur contre du souffle ?
16.     Aussi, tous ses jours il mangera dans la ténèbre;
trop d’irritation, de maladies, d’écume...
17.     Voici ce que je vois, moi, il est bel et bien de manger, de boire,
de voir du bonheur dans tout son labeur dont il a labeur sous le soleil,
au nombre des jours de sa vie que l’Elohîms lui donne.
Oui, telle est sa part.
18.     Aussi, tout humain auquel Elohîms donne la richesse et des biens,
et lui permet d’en manger, de porter sa part et
de se réjouir de son labeur, voilà, c’est un don d’Elohîms.
19.     Oui, il se souviendra de ce que peu nombreux sont les jours de sa vie,
et de ce que l’Elohîms lui répond par la joie de son coeur.

Chapitre 6.

Un malheur sous le soleil

1.     Il existe un malheur que j’ai vu sous le soleil;
il est grave pour l’humain:
2.     un homme auquel Elohîms donne la richesse, des biens, la gloire,
et qui ne manque de rien pour son être en tout ce qu’il désire.
Mais Elohîms ne lui permet pas d’en manger;
oui, c’est un homme étranger qui le mangera.
C’est une fumée, une morbidité du mal.
3.     Quand l’homme en ferait enfanter cent et vivrait de multiples années,
pour multiples que soient les jours de ses années,
son être ne serait guère rassasié de bonheur;
il n’aurait même pas de sépulture.
Je dis: « Un avorton est mieux que lui »,
4.     car il est venu dans la fumée, et dans la ténèbre il s’en va;
son nom est couvert par la ténèbre.
5.     Il n’a même pas vu ni connu le soleil.
Celui-ci a plus de répit que celui-là.
6.     Qu’il vive deux fois mille ans sans voir de bonheur,
tout ne va-t-il pas vers un lieu unique ?
7.     Tout le labeur de l’humain est pour sa bouche;
mais aussi l’être ne s’en remplit pas.
8.     Oui, qu’a le sage de plus que le fou ?
Que sait l’humilié pour aller contre la vie ?
9.     Mieux vaut ce que les yeux voient que d’aller après l’être.
Cela aussi, fumée, pâture de souffle.
10.     Ce qui est, son nom s’est déjà crié;
mais il est connu, pour ce qui est de l’humain,
qu’il ne peut contester avec plus vigoureux que lui.
11.     Oui, il existe de multiples paroles qui multiplient la fumée.
Quoi de plus pour l’humain ?
12.     Oui, qui sait ce qui est bon pour l’humain dans la vie ?
Le nombre de jours de sa fumée de vie, il les a faits comme une ombre.
Qui donc rapporte à l’humain ce qui est après lui sous le soleil ?

Chapitre 7.

Mieux vaut...

1.     Mieux vaut bon renom que bonne huile,
et le jour de la mort que le jour de sa naissance.
2.     Mieux vaut aller à la maison de deuil qu’aller à la maison du festin,
en ce que c’est la fin de tout humain.
Le vivant le donne à son coeur.
3.     Mieux vaut l’irritation que le jeu; oui, à face mauvaise, bon coeur.
4.     Le coeur des sages dans la maison de deuil,
le coeur des fous dans la maison de joie.
5.     Mieux vaut entendre la réprobation du sage
que, pour un homme, entendre le poème des fous.
6.     Oui, comme la voix des pimprenelles sous un pot,
ainsi le rire du fou. Et cela aussi, fumée !
7.     Oui, l’oppression rend le sage insane. Le don perd le coeur.
8.     Mieux vaut l’avenir d’une parole que son en-tête.
Mieux vaut longueur de souffle que hauteur de souffle.
9.     Ne t’affole pas en ton souffle pour t’irriter:
oui, l’irritation repose au sein des fous.
10.     Ne dis pas: « Qu’en était-il pour que les premiers jours
fussent meilleurs que ceux-ci ? »
Non, ce n’est pas par sagesse que tu demandes cela !

Sagesse

11.     Bonne est la sagesse avec la possession;
c’est l’avantage des voyants du soleil.
12.     Oui, à l’ombre de la sagesse, à l’ombre de l’argent,
savoir est un avantage. La sagesse vivifie ses maîtres.
13.     Vois le fait d’Elohîms: oui, qui peut réparer ce qu’il tord ?
14.     Au jour du bonheur, sois dans le bien.
Au jour du malheur, vois,
Elohîms a fait aussi celui-ci juxtaposé à celui-là,
à propos de ce que l’humain ne trouve rien après lui.
15.     J’ai tout vu dans les jours de ma fumée:
tel juste existe qui perd avec sa justice;
tel criminel existe qui se prolonge dans son mal.
16.     Ne sois pas trop juste, ne t’assagis pas à l’excès:
pourquoi te désolerais-tu ?
17.     Ne t’accuse pas trop, ne sois pas fol:
pourquoi mourrais-tu avant ton heure ?
18.     Mieux vaut que tu saisisses ceci,
et de cela aussi ne dépose pas ta main:
oui, qui frémit d’Elohîms sort de tout.

Je me suis retourné

19.     La sagesse rend le sage plus fort que les dix potentats
qui sont dans la ville.
20.     Oui, il n’est pas sur terre d’homme juste qui fasse le bien sans faute.
21.     Aussi, à toutes les paroles dont ils parleront, ne donne pas ton coeur:
ainsi tu n’entendras pas ton serviteur te maudire.
22.     Oui, de multiples fois ton coeur sait aussi
que toi aussi tu en as maudit d’autres.
23.     Tout cela je l’ai prouvé dans la sagesse.
Je dis: « Je serai sage. » Mais elle est loin de moi !
24.     Loin de ce qui est profond, profond... Qui le trouvera ?
25.     Je me suis retourné, moi et mon coeur, pour savoir,
pour prospecter, chercher sagesse, calcul,
et pénétrer que le crime est fou, et la folie insane.

La femme et la mort

26.     Je trouve, moi, la femme plus amère que la mort;
oui, son coeur est trappes et rets, ses mains sont des attaches.
Le bien, en face de l’Elohîms, lui échappe;
le fauteur est pris par elle.
27.     Vois, j’ai trouvé ceci, dit le Qohèlèt, une à une trouver le compte.
28.     Ce que mon être cherche encore, je ne l’ai pas trouvé.
J’ai trouvé un humain sur mille,
mais une seule femme, parmi toutes celles-là, je ne l’ai pas trouvée.
29.     D’ailleurs, vois, j’ai trouvé ceci, que l’Elohîms a fait l’humain droit;
mais eux, ils ont cherché de multiples calculs.

Chapitre 8.

Le sens de la parole

1.     Qui est comme le sage ? Qui pénètre le sens de la parole ?
La sagesse de l’humain illumine ses faces;
la rudesse de ses faces en est changée.
2.     Moi: « La bouche du roi, garde-la
et toute parole d’un serment d’Elohîms.
3.     Ne t’affole pas quand en face de lui tu vas;
ne tiens pas propos de mal;
oui, il fait tout ce qu’il désire,
4.     en ce que la parole du roi, c’est le pouvoir.
Qui lui dira: « Que fais-tu ? »
5.     Gardien de l’ordre ne connaît pas propos de mal.
Le temps et le jugement, il les connaît, le coeur sage.
6.     Oui, à tout dessein, il existe un temps et un jugement,
quand le mal de l’humain abonde contre lui.
7.     Non, il ne sait pas ce qui sera, car, ce qui sera, qui le lui rapporterait ?
8.     Nul homme ne domine le souffle pour écrouer le souffle,
et nulle domination du jour de la mort,
nulle délégation dans la guerre.
Le crime ne quitte pas ses maîtres.
9.     Tout cela, je l’ai vu, j’ai donné mon coeur
à tout fait ce qui se fait sous le soleil,
au temps où l’humain domine l’humain pour son mal.

10.     Ainsi j’ai vu des criminels ensevelis.
Ils venaient du lieu sacré où ils allaient,
et ils faisaient oublier en ville ce qu’ils avaient certes fait !
Cela aussi, fumée !
11.     Que la sanction d’un méfait ne se fasse pas vite,
il remplit le coeur des fils de l’humain pour méfaire.
12.     Que le fauteur fasse le mal un centuple et qu’il le prolonge,
quand je sais, moi aussi, que le bien est pour les frémissants d’Elohîms,
qui frémissent en face de lui !
13.     Mais: « Le bien n’est pas au criminel,
ses jours ne se prolongeront pas, comme l’ombre,
lui qui ne frémit pas en face de l’Elohîms ! »
14.     Il est une fumée, ce qui se fait sur terre,
où il existe des justes à qui arrive le fait des criminels,
et où il existe des criminels à qui arrive le fait des justes.
Je dis que cela aussi, fumée !

La joie

15.     Je vante, moi, la joie ! Rien ne vaut pour l’humain sous le soleil
que manger, boire, se réjouir.
Qu’elle l’accompagne dans son labeur, les jours de sa vie
que l’Elohîms lui donne sous le soleil !
16.     Quand j’ai donné mon coeur à pénétrer la sagesse,
à voir l’intérêt de ce qui se fait sur terre,
que de jour et de nuit aussi, il ne voit pas de sommeil sur ses yeux,
17.     j’ai vu tout le fait d’Elohîms;
non, l’humain ne peut pas trouver le fait qui se fait sous le soleil.
Quoique l’humain ait pour labeur de demander, il ne le trouvera pas.
Même si le sage dit qu’il sait, il ne peut trouver.

Chapitre 9.

Une même aventure

1.     Oui, j’ai donné mon coeur à tout cela pour élucider tout cela,
que les justes, les sages et leurs travaux sont en main d’Elohîms.
Même de l’amour, même de la haine
l’humain ne sait rien, tout en face d’eux.
2.     Que tout est à tous:
une même aventure pour le juste et le criminel;
pour le bon, pour le pur, pour le contaminé;
pour qui sacrifie et pour qui ne sacrifie pas.
Le bon est comme le fauteur;
le jureur est comme celui qui frémit de jurer.
3.     Voici le mal en tout ce qui se fait sous le soleil:
oui, une même aventure pour tous.
Le coeur des fils de l’humain est aussi plein de mal,
l’insanité est au coeur de leur vie.
Et après lui, aux morts !
4.     Oui, il est une sécurité à celui qui est associé à tous les vivants.
Oui, un chien vivant vaut mieux qu’un lion mort.
5.     Oui, les vivants savent qu’ils mourront, mais les morts ne savent rien;
oui, ils n’ont pas de salaire. Leur souvenir est oublié,
6.     leur amour aussi, leur haine aussi,
leur ardeur aussi; c’est déjà perdu !
Plus de part pour eux en pérennité dans tout ce qui se fait sous le soleil.

La femme que tu aimes

7.     Va, mange avec joie ton pain, bois de bon coeur ton vin;
oui, Elohîms a déjà agréé tes faits.
8.     Qu’en tout temps tes habits soient blancs;
l’huile ne manquera pas sur ta tête.
9.     Vois la vie avec la femme que tu aimes,
tous les jours de ta fumée de vie, qu’il t’a donnée sous le soleil,
tous les jours de ta fumée; oui, c’est ta part dans la vie,
dans ton labeur que tu as pour labeur sous le soleil.
10.     Tout ce que ta main trouve à faire, fais-le dans ta force;
non, pas de fait, de compte, de pénétration, de sagesse,
au Shéol, là où tu vas.

Mesquin, mais sage

11.     Je suis retourné et vois sous le soleil:
non, la course n’est pas aux légers, ni la guerre aux héros;
le pain aussi n’est pas aux sages, ni même la richesse aux sagaces,
ni même la grâce aux savants;
oui, le temps et l’accident adviennent à eux tous.
12.     Non, l’humain aussi ne pénètre pas son temps.
Comme les poissons saisis dans la trappe du malheur,
comme les oiseaux saisis au piège,
les fils de l’humain sont piégés au temps du malheur,
quand il tombe sur eux soudain.
13.     Cela aussi je le vois: une sagesse sous le soleil, grande pour moi !
14.     Une petite ville avec en elle peu d’hommes.
Un grand roi y vient et la contourne.
Il bâtit contre elle de grandes trappes.
15.     Il y trouve un homme, mesquin mais sage,
qui fait s’échapper la ville par sa sagesse.
Mais pas un humain ne se souvient de l’homme mesquin !
16.     Moi, je dis: « Mieux vaut sagesse qu’héroïsme ! »
La sagesse du mesquin est méprisée,
ses paroles ne sont pas entendues.
17.     Les paroles des sages sont entendues avec répit,
plus que la clameur d’un gouverneur parmi des fous.
18.     Mieux vaut sagesse qu’engins de taille.
Un seul fauteur perd un bonheur multiple.

Chapitre 10.

Labeur des fous

1.     Mouches de mort empestent et gâtent l’huile du droguiste.
Un peu de folie est plus précieuse que sagesse et que gloire.
2.     Coeur du sage à sa droite, coeur du fou à sa gauche.
3.     Sur la route aussi quand le fou va, le coeur lui manque.
Il dit à tous: « C’est un fou. »
4.     Si le souffle du gouverneur monte contre toi, ne lâche pas ton lieu:
oui, la guérison repose de grandes fautes.
5.     Il est un malheur, je le vois sous le soleil,
comme un égarement sorti des faces du dominateur:
6.     la folie donnée aux multiples altitudes,
tandis que des riches dans l’abaissement habitent.
7.     Je vois des esclaves sur des chevaux,
et des chefs aller à terre comme des esclaves.
8.     Qui fore une cavité y tombe.
Qui fait une brèche dans une clôture, un serpent le mord.
9.     Transporteur de pierres peine avec elles.
Fendeur de bois s’y risque.
10.     Si le fer s’émousse, et si la lame n’est pas aiguisée,
il faut redoubler de vaillance. La sagesse avantage le talent.
11.     Si le serpent mord sans chuchotis,
pas d’avantage au maître de la langue.
12.     Les paroles de la bouche du sage sont grâce.
Les lèvres du fou l’engloutissent.
13.     Le commencement des paroles de sa bouche, c’est folie;
l’après de sa bouche, une insanité malfaisante.
14.     Le fou multiplie les paroles, mais l’humain ne sait ce qui sera;
et ce qui est après lui, qui le lui rapportera ?
15.     Le labeur des fous les lasse, eux qui ne savent pas aller vers la ville.
16.     Oïe, toi, terre dont le roi est un adolescent,
et dont les chefs mangent dès le matin !
17.     En marche, toi, terre dont le roi est le fils d’un dignitaire,
et dont les chefs mangent à temps, avec héroïsme et sans beuverie !
18.     À paresse double, la charpente pourrit;
au rabais des mains, la maison suinte.
19.     Pour jouer, ils font un festin; le vin réjouit les vivants,
et l’argent exauce tout.
20.     En ton escient aussi, ne maudis pas le roi;
dans les alcôves de ta couche, ne maudis pas le riche:
oui, le volatile des ciels fait aller la voix,
le maître à deux ailes leur rapporte la parole.

Chapitre 11.

Semailles

1.     Lance ton pain sur les faces des eaux:
oui, dans la multiplicité des eaux, tu le trouveras.
2.     Donne une part à sept, et même à huit,
car tu ne sais quel labeur sera sur terre.
3.     Si les nébulosités sont pleines, elles vident la pluie sur terre.
Si un arbre tombe au midi ou au septentrion,
au lieu où tombe l’arbre, là il reste.
4.     Gardeur de souffle ne sème pas;
voyeur de nébulosités ne moissonne pas.
5.     Comme tu ne pénètres pas quelle est la route du souffle,
ni les os dans un ventre plein,
ainsi tu ne pénètres pas le fait de l’Elohîms qui fait tout.
6.     Le matin, sème ta semence; le soir, ne repose pas ta main:
non, tu ne pénètres pas qui réussira, celui-ci ou celui-là,
ni si tous les deux, comme un seul, sont bons.
7.     La lumière est douce; il est bien pour les yeux de voir le soleil.
8.     Oui, si l’humain vit de multiples années, il se réjouit de toutes.
Qu’il se souvienne de ce que les jours de ténèbre, oui, sont multiples.
Tout ce qui vient, fumée !
9.     Réjouis-toi, adolescent, en ton enfance !
Que ton coeur te fasse du bien aux jours de ton adolescence;
va aux routes de ton coeur, à la vision de tes yeux;
et sache que pour tout cela l’Elohîms te fera venir en jugement !
10.     Écarte l’irritation de ton coeur, fais passer le malheur de ta chair !
Oui, enfance, aurore, fumée !

Chapitre 12.

Viennent les jours du malheur

1.     Souviens-toi de ton créateur aux jours de ton adolescence,
avant que ne viennent les jours du malheur
et n’arrivent les années où tu diras: « Je n’en ai pas le désir »,
2.     avant que le soleil ne s’enténèbre avec la lumière, la lune et les étoiles,
que les nébulosités ne s’en retournent après la pluie,
3.     le jour où s’agitent les gardiens de la maison;
se tordent les hommes vaillants;
baguenaudent les meulières qui se raréfient;
s’enténèbrent les voyeurs aux lucarnes;
4.     se ferment les deux portails sur le marché;
à la chute de la voix du moulin, se lève la voix de l’oiseau
et s’inclinent toutes les filles du poème.
5.     Ils frémissent aussi de la hauteur et se consternent sur la route.
L’amandier scintille, la locuste se fait lourde, la câpre s’annule.
Oui, il va, l’humain, vers la maison de sa pérennité.
Les pleureurs tournent au marché,
6.     jusqu’à ce que se rompe la corde d’argent,
que la sphère d’or se fracasse,
la cruche se brise sur la cascade,
la roue se fracasse dans la fosse.
7.     La poussière retourne à la terre comme elle était,
et le souffle retourne vers Elohîms qui l’a donné...
8.     Fumée de fumées, dit le Qohèlèt, tout est fumée !

Un écrit de droiture

9.     En plus de ce que Qohèlèt était un sage,
il a encore appris au peuple la pénétration.
Il a pesé, sondé, corrigé de multiples exemples.
10.     Qohèlèt a demandé à trouver des paroles désirables,
un écrit de droiture, des paroles de vérité.
11.     Les paroles des sages sont comme des aiguillons,
les maîtres des congrégations comme des clous plantés;
elles sont données par un pâtre unique.
12.     Plus que par elles, mon fils, sois prévenu:
faire des livres multiples n’a pas de fin;
le murmure multiple lasse la chair.
13.     Parole de la fin: tout entendu, frémis d’Elohîms,
garde ses ordres. Oui, voilà tout l’humain.
14.     Oui, l’Elohîms fera venir en jugement
pour tout ce qui est occulte, soit le bien, soit le mal.